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12/05/2015

Julien Coupat : "Ce monde va dans le mur, et le sait"

 julien coupat

Commentaire de ses propos

 (publiés dans L'Obs de demain) :


 

« Nous vivons dans un monde qui va dans le mur à tombeau ouvert et qui le sait...»

 

« Un temps, l'internet et les réseaux sociaux ont servi de soupape de sécurité, mais ils sont à présent en voie de flicage avancé... »

 

« Ils croient vraiment qu'ils vont pouvoir refaire avec quinze ans de retard le coup du néo-conservatisme martial, et que nous sommes tous trop bêtes, trop lâches et trop passifs pour nous en insurger... »

 

« Le régime social-démocrate actuel, chacun le constate, est en passe de réussir ce que Nicolas Sarkozy n'a pas réussi à faire, en matière d'austérité comme d'antiterrorisme, de droit du travail comme de répression de tout ce qui se trouve à sa gauche... »

 

« Tout le paysage de la politique classique n'est qu'un vaste champ de ruines, FN compris... »

 

« La seule façon de desserrer l'étau où nous sommes pris est d'entrer en guerre, d'une manière ou d'une autre, contre ce qui nous gouverne. »

 

 

Commentaires :

 

L'expression « à tombeau ouvert » a plusieurs sens possibles. Elle peut vouloir dire que ce monde économique et politique est condamné à disparaître : auquel cas la seule voie raisonnable est de préparer l'après, avec les moyens du bord. Elle peut aussi vouloir dire que le tombeau ouvert est celui de l'humanisme : la condition humaine est menacée par la machine économique et financière (substituée au monde humain), qui siphonne les ultimes ressources de la nature et s'empare de toutes les formes du vivant pour les artificialiser et en faire des produits marchands*. En ce cas le tombeau ouvert est le nôtre, non celui du système ! Mais ce processus annonce un monde post-humain dont la perspective est révoltante.

 

Sur l'internet, nos existences étaient « fliquées » par le profilage commercial (« avancé »). Voici maintenant la loi de surveillance générale de M. Valls. Ce sont les deux mâchoires de la même tenaille. Une partie de la droite libérale ne voit que la mâchoire Valls et regimbe ; l'autre partie ne voit rien et vote la loi, pour être des Américains comme les autres.

 

« Le coup du néo-conservatisme martial » repose sur cette ardente obsession d'être tous américains : formatés par l'absorption télévisée de films US à haute dose, beaucoup de Français sont prêts à admettre des éventualités socio-politiques qui auraient paru inadmissibles il y a trente ans. C'est devenu leur univers mental. Des mots quotidiens de la langue française perdent l'un après l'autre leur sens pour prendre le sens américain (faites le test**) ; l'acculturation est une perte de soi.

 

Le régime social-démocrate est sur la même ligne que l'ex-régime Sarkozy : parce que les deux n'en font qu'un, le politique s'étant vidé au profit de la sphère financière depuis plus de vingt-cinq ans. Toute réflexion sur l'avenir passe par ce constat. Ceux qui s'y dérobent se fourvoient.

 

«Tout le paysage de la politique classique n'est qu'un vaste champ de ruines, FN compris » : le FN sous JMLP était une pièce négative de la politique classique, mise en place par François Mitterrand. Le FN sous MLP vise à devenir une pièce positive de la politique classique. Comme la politique classique « va dans le mur à tombeau ouvert », on voit ce que vaut le FN (sans parler de son actuel étripage interne) ; toutes nos condoléances à l'extrême droite catho.

 

«Entrer en guerre contre ce qui nous gouverne » : l'expression est juste, à cause du mot « ce ». Nous sommes gouvernés (si l'on peut dire) non par « ceux », mais par « ce » : une chose, un jeu de forces, un ça anonyme. Une machinerie. Elle produit même les nouvelles moeurs... Or on ne renverse pas une machinerie en criant dans la rue, même à six cent mille. Entrer en guerre veut dire autre chose que de se promener avec un t-shirt à emblème et crier qu'on ne lâchera rien ! Que vous lâchiez ou non, la machinerie s'en fout. Vous manifestez le samedi ; le lundi vous êtes dans votre bureau où vous travaillez pour la machinerie.

Eh oui. Il va falloir y penser.

 

 

julien coupat

 

_______________

 

* cf. Cathos, écolos, mêmes combats ?    

editions@peuplelibre.fr  

http://lesalternativescatholiques.fr/2015/04/24/le-premier-livre-des-altercathos-a-paraitre-prochainement-cathos-ecolos-memes-combats/ 

 

** « Nous comprenons que » au lieu de « nous constatons que »... « Délivrer » une idée au lieu de la « transmettre »... «Clairement » au lieu de « à l'évidence »... La liste est sans fin.  Sans compter les slogans directement en anglais. Lu (hier) sur les palissades d'un grand centre commercial près de Paris : « Unexpected travaux ».

 

11:07 Publié dans Idées | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : julien coupat

Commentaires



> Et donc, pour en venir où ?

RH


[ PP à RH
- D'abord à ouvrir les yeux sur la réalité, qui ne coïncide pas avec nos préférences !
- Eléments de réponse dans 'Cathos, écolos, mêmes combats ?" ]

réponse au commentaire

Écrit par : RH / | 12/05/2015

JÉRÉMIE

> J'aime bien le côté Jérémie chez Julien Coupat et dans "L'Insurrection qui vient".

Guadet


[ PP à G. - "J'ai suscité pour vous des guetteurs : faites attention au son du cor !"
(Jérémie 6,17) ]

réponse au commentaire

Écrit par : Guadet / | 12/05/2015

VÉRITÉ

> Merci PP de nous aider une fois de plus à discerner la vérité, qui n'est pas l'apanage d'un camp, fut-il celui des saints autoproclamés ...
Coupat n'est pas un saint lui-même. N'oublions pas qu'il se réclame lui aussi d'une idéologie messianiste, toute empreinte de matérialisme (marxiste ?) et de la pensée de Rousseau : l'homme est bon, le système l'avilit (ce qui n'est pas faux), il suffirait d'un bon système pour tout aille au mieux et que le Royaume s'établisse sur terre.
Des volontaires pour annoncer la Bonne Nouvelle à Tarnac ?
______

Écrit par : Olaf / | 12/05/2015

PSAUME 143

> En écho à votre citation de Jérémie… Ce qui est dommage, pour Julien Coupat, c’est qu’apparemment il n’est pas croyant et ne peut s’appuyer, comme nous, dans la tribulation, sur la louange divine.
Lorsqu’il énonce : « Entrer en guerre contre ce qui nous gouverne », j’ai envie de répondre avec le psaume 143, « pour toi, je chanterai un chant nouveau ».
A l’instar de David, bénissons « le Seigneur, mon rocher ! Il exerce mes mains pour le combat, il m’entraîne à la bataille ». Mais après avoir crié avec lui « tends-moi la main, délivre-moi, sauve-moi », entonnons les fameux versets 9 et 10 : « Pour toi, je chanterai un chant nouveau, pour toi, je jouerai sur la harpe à dix cordes, pour toi qui donnes aux rois la victoire et sauves de l'épée meurtrière David, ton serviteur »… Où l’on voit bien que, comme le roi David, seul notre Seigneur peut nous « donner la victoire ». Et donc que la meilleure façon d’« entrer en guerre », pour un chrétien, c’est de louer le Seigneur et de tout remettre entre Ses mains en faisant connaître à tous les peuples la Bonne Nouvelle du Christ ressuscité !
Allez… pour prolonger la louange de David, et pour nous donner, ainsi qu’à Julien Coupat, les mots qui peut-être nous manquent dans ces temps mauvais, ce rappel de la prière pour la France que Notre Seigneur inspira à l’humble frère rédemptoriste Marcel Van (1928-1959) :
« Seigneur Jésus, aie pitié de la France !
Daigne la serrer sur ton Cœur ; montre-lui combien tu l’aimes.
Purifie-là, fortifie-la dans ton Esprit Saint.
Que la France contribue à Te faire aimer de toutes les nations !
Ô Jésus, nous autres Français Te promettons fidélité.
Oui, nous nous engageons à travailler d’un cœur ardent à l’extension de ton Règne sur la terre, ne comptant en rien sur nous, mais uniquement sur Toi.
Amen ! »
______

Écrit par : Denis | 12/05/2015

@ Olaf

> Je ne voterais probablement pas pour Coupat aux présidentielles mais…
Une civilisation a besoin d'une tension constante entre tradition et provocation contre la tradition. Pour permettre un réel progrès grâce à une tradition vivante, elle doit préserver officiellement la tradition mais permettre la provocation. Aujourd'hui règne le conformisme, qui a remplacé la tradition et absorbé la provocation. Les anciens provocateurs ont pu être neutralisé en leur donnant le pouvoir de régir la société. Cohn-Bendit, Beauvoir, les maoïstes et l'avant-garde artistique des années 1960 ont été appelés à créer un conformisme inattaquable puisque venant de la provocation, et servant de bouclier à la main-mise des plus forts sur le pouvoir. Quiconque accuse cet état de fait est donc forcément réactionnaire ou fasciste. D'où l'ambiguité de la position des partis alternatifs à l'UMPS qui critiquent superficiellement le système sans oser ou vouloir vraiment le mettre en danger.
______

Écrit par : Guadet | 12/05/2015

MACHINERIE

> "Or on ne renverse pas une machinerie en criant dans la rue, même à six cent mille. Entrer en guerre veut dire autre chose que de se promener avec un t-shirt à emblème et crier qu'on ne lâchera rien ! Que vous lâchiez ou non, la machinerie s'en fout. Vous manifestez le samedi ; le lundi vous êtes dans votre bureau où vous travaillez pour la machinerie."
Très juste, très juste... Mais comment faire, quand on est chargé de famille, et que l'on doit se soumettre au système pour que les siens puissent vivre dignement (quitte à ne plus pouvoir se regarder dans une glace après ) ?

Feld



[ PP à Feld :

- Je ne veux pas dire qu'il ne faut pas nourrir sa famille (cas de force majeure !).
- Je veux dire qu'il était naïf de croire qu'il aurait suffi de "marcher sur l'Elysée avec la Manif pour tous", comme on l'a entendu dire en 2013.
- En effet, :
a) ce n'est pas dans ces termes que se pose le problème au XXIe siècle,
b) ceux qui disaient "dictature socialiste !" n'avaient pas compris que la politique est aujourd'hui un moulin à vent, et n'admettaient pas que ce qu'ils déploraient (une loi) était inséparable de tout un système de société formaté par le modèle économique. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Feld / | 12/05/2015

LE T.T.I.P.

> C'est un peu hors sujet, mais pas complètement : nouveau revers législatif pour le TTIP. Oh, on parviendra à passer outre, bien sûr, mais toute péripétie est bonne à prendre.
http://www.theguardian.com/us-news/2015/may/12/obama-trans-pacific-partnership-senate-vote?CMP=share_btn_tw

Le plus fascinant dans cet article, c'est l'appel au libre-échange créateur d'emplois de M. Obama depuis le QG de Nike, la boîte qui se flatte de n'avoir jamais fabriqué une chaussure aux USA et dont le fondateur, interrogé par Michael Moore, trouvait que 14 ans, c'était le bon âge pour qu'une petite Indonésienne aille à l'usine.
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Écrit par : Christian Vennec / | 13/05/2015

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